Article du journal Le Télégramme.
Des prix Nobel, des intellectuels de renom, tous réunis chaque été sur la pointe bretonne de l’Arcouest, face à l’île de Bréhat au XXe siècle. Ce pan d’histoire aussi exceptionnel que méconnu se découvre sous l’œil de la caméra de Florence Riou.
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Hélène Langevin-Joliot, physicienne et petite fille de Marie Curie et Florence Riou, lors du tournage du documentaire en 2022. (Le Télégramme/Régis Nescop)
Florence Riou aime la science et le cinéma. Durant ses études, la Quimpéroise n’a jamais tranché entre ses deux univers. Ses deux passions. Au lycée à Douarnenez, elle avait choisi une option cinéma, bien avant de soutenir une thèse en 2008 à Nantes sur « la diffusion des sciences par le cinéma, des précurseurs à Jean Painlevé ». La suite sera jalonnée d’écrits, de recherches et de documentaires, toujours au croisement de la culture scientifique et de l’histoire. En s’emparant de cette incroyable histoire de l’Arcouest, du nom de cette pointe bretonne, elle s’est donné les moyens de faire un documentaire sur ce qui la passionne : l’affaire Dreyfus, la science et sa diffusion dans la société.
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Pour aller plus loin.
Discours de Pierre Curie à la remise de leur prix Nobel à Pierre et Marie Curie en 1903.
Sa conclusion:
On peut concevoir encore que dans des mains criminelles le radium puisse devenir très dangereux, et ici on peut se demander si l'humanité a avantage à connaître les secrets de la nature, si elle est mûre pour en profiter ou si cette connaissance ne lui sera pas nuisible. L'exemple des découvertes de Nobel est caractéristique, les explosifs puissants ont permis aux hommes de faire des travaux admirables. Ils sont aussi un moyen terrible de destruction entre les mains des grands criminels qui entraînent les peuples vers la guerre. Je suis de ceux qui pensent, avec Nobel, que l'humanité tirera plus de bien que de mal des découvertes nouvelles.
Discours de Marie Curie à la remise de son prix Nobel en 1911
Introduction de son discours au banquet suivant la remise du prix :
Je remercie l’Académie des Sciences du très grand honneur qu’elle m’a fait. Je crois que cet honneur ne s’adresse point uniquement à moi. Pendant de longues années, Pierre Curie et moi avons consacré toutes nos journées aux travaux concernant nos découvertes communes du radium et du polonium. Je crois donc interpréter dans son vrai sens la pensée de l’Académie, en disant que ce prix Nobel qu’on vient de me décerner est aussi un hommage rendu au nom de Pierre Curie.
Qu’on me permette en outre d’exprimer la joie que je ressens en pensant à la radio-activité. La découverte des phénomènes radio-actifs ne date que de quinze ans. La radio-activité est donc une science très jeune. C’est un enfant que j’ai vu naître et que j’ai contribué, de toutes mes forces, à élever. L’enfant a grandi, il est devenu beau. La radio-activité est une science nouvelle qui a des rapports très étroits avec la physique et la chimie mais qui n’en est pas moins absolument distincte. Nous avons aujourd’hui des institutions et des laboratoires pour la radio-activité; de nombreux savants se consacrent à l’étude des phénomènes radio-actifs. Le développement en a été admirable; mais l’on n’aurait pu espérer non plus de plus bel encouragement que celui dont la jeune science a été l’objet de la part de l’Académie des Sciences de Suède qui a décerné trois prix Nobel, un de physique, deux de chimie, aux quatre chercheurs Henri Becquerel, Pierre Curie, Marie Curie et E. Rutherford.
Discours de Irène et Frédéric Joliot Curie à la remise de leur prix Nobel en 1935.
Conclusion de Frédéric Joliot-Curie :
Si, tourné vers le passé, nous jetons un regard sur les progrès accomplis par la science à une allure toujours croissante, nous sommes en droit de penser que les chercheurs construisant ou brisant les éléments à volonté sauront réaliser des transmutations à caractère explosif, véritables réactions chimique à chaînes.
Si de telles transmutations arrivent à se propager dans la matière, on peut concevoir l’énorme libération d'énergie utilisable qui aura lieu. Mais hélas, si la contagion a lieu pour tous les éléments de notre planète, nous devons prévoir avec appréhension les conséquences du déclenchement d'un pareil cataclysme. Les astronomes observent parfois qu'une étoile d'éclat médiocre augmente brusquement de grandeur, une étoile invisible à l’œil nu peut devenir très brillante et visible sans instrument, c'est l’apparition d'une Novae. Ce brusque embrasement de l’étoile est peut-être provoqué par ces transmutations à caractère explosif, processus que les chercheurs s'efforceront sans doute de réaliser, en prenant, nous l’espérons, les précautions nécessaires.
Notre remarque : la fission de l'uranium et la réaction en chaîne ne seront découvertes que quatre ans plus tard.