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16 novembre 2023 4 16 /11 /novembre /2023 12:38

Dans une lettre ouverte, 1 240 étudiants issus d’universités et de grandes écoles (AgroParisTech, Ecole polytechnique, HEC…) s’engagent à ne pas rejoindre les rangs de la banque française en raison de son soutien à de nouveaux projets d’extraction de pétrole et de gaz.
 

Publié le 15 novembre 2023.

Nous sommes étudiant·es et jeunes diplômé·es d’universités et d’écoles françaises (AgroParisTech, CentraleSupelec, Ecole polytechnique, Sciences-Po, HEC…). Nous constatons que BNP Paribas tente d’instrumentaliser nos craintes et nos convictions et cible notre génération avec son greenwashing, dans sa publicité et sur nos campus (stands vantant ses offres bancaires et jobs à impact, par exemple).

 

Nous ne sommes pas dupes. Nous prenons ici l’engagement de ne pas travailler pour des banques qui, comme BNP Paribas, refusent de regarder la vérité climatique en face et continuent de financer des entreprises qui prévoient de nouveaux projets d’énergies fossiles. Ces bombes climatiques menacent directement notre futur, et nous affirmons haut et fort que nous ne participerons pas à une telle destruction.
 

La science est sans appel

 

Le consensus scientifique ne laisse aucune place au débat : les énergies fossiles doivent appartenir au passé.

 

Le Groupe d’experts Intergouvernemental sur l’Evolution du Climat (Giec) et l’Agence Internationale de l’Energie (AIE) sont formel·les sur la nécessité d’arrêter de développer de nouveaux champs pétroliers et gaziers pour respecter l’Accord de Paris et limiter le réchauffement à 1,5 °C. Alors que nous nous éloignons chaque jour un peu plus de cet objectif, il faut prendre des mesures radicales à la hauteur des enjeux.
 

Enquête sur le « climato-je-m’en-foutisme » qui règne au sommet de l’Etat

Cet impératif absolu doit dessiner une ligne rouge claire pour les banques, comme le répétait récemment le secrétaire général des Nations unies, António Guterres :
 

"« Les institutions financières doivent s’engager à mettre fin à leurs financements et investissements dans l’exploration et l’expansion de nouveaux gisements de pétrole et gaz. »"

 

C’est la demande qui a été adressée à plusieurs reprises par 600 scientifiques, dont des membres du Giec, au conseil d’administration de BNP Paribas, sans trouver à ce jour une réponse satisfaisante.
 

Des activités lourdes de conséquences

 

Après avoir financé pendant des décennies un monde carboné devenu insoutenable, les banques ont le pouvoir et la responsabilité de nous sortir de notre dépendance aux énergies fossiles, en réorientant leurs financements vers une transition écologique juste. Ce n’est malheureusement pas le cas des principales banques françaises : Crédit agricole, Société générale, Banque populaire Caisse d’épargne et, en tête du classement, BNP Paribas.

Les chiffres en attestent. Au cours des sept années qui ont suivi l’adoption de l’Accord de Paris, BNP Paribas a accordé 165 milliards de dollars aux énergies fossiles. Son rôle est majeur : elle a été entre 2016 et 2022 le premier financeur européen et le quatrième au niveau mondial du développement des énergies fossiles.
 

Climat : ce qu’il faut retenir du rapport de synthèse du Giec

 

Ces activités ont déjà de lourdes conséquences climatiques : l’empreinte carbone de BNP Paribas en 2020 est à elle seule supérieure à celle du territoire français. Les annonces faites en mai dernier par BNP Paribas ne changent pas cette donne : la banque n’a mis fin qu’à une part très restreinte de ses nombreux soutiens à l’industrie fossile. Ainsi, ses décisions financières actuelles contraignent encore nos vies futures.

 

Cela lui a valu d’être assignée en justice cette année pour non-respect de son devoir de vigilance en matière climatique par trois ONG (Les Amis de la Terre France, Notre Affaire à Tous et Oxfam France).
 

Premier financeur des majors du pétrole

 

Face à une jeunesse déterminée devant les périls climatiques, BNP Paribas expérimente des difficultés de recrutement. La banque explique qu’elle a changé et qu’elle œuvre pour le climat et promet de merveilleux « jobs à impact ». Mais comment la croire ?

 

Entre 2016 et 2022, la banque française a été le premier financeur des neuf majors du pétrole et du gaz, parmi lesquelles la française Total Energies. Ainsi, quand BNP Paribas annonçait d’une main ne pas financer directement le tristement célèbre projet Tilenga-EACOP en Ouganda et Tanzanie, elle continuait de l’autre à accorder de larges soutiens à Total Energies. BNP Paribas, dont le président siège au conseil d’administration de Total Energies, ne peut ignorer la stratégie dangereuse menée par son client.
 

Climat : trois ONG assignent BNP Paribas en justice pour manquement à son devoir de vigilance

 

La banque est également l’un des principaux financeurs du mastodonte Saudi Aramco, l’entreprise qui prévoit le plus de nouveaux projets de pétrole et de gaz de la planète. A ce titre, elle a reçu, en cet été de tous les records caniculaires, une alerte sans précédent des Nations unies : ses financements pourraient constituer une atteinte aux droits humains.
Notre décision est prise

 

Il est pourtant possible d’en finir avec ces soutiens toxiques. La Banque postale l’a fait, elle n’octroie désormais des financements qu’aux entreprises qui ont un plan de sortie des énergies fossiles d’ici à 2040 et ne développent plus de nouveaux projets dans ce domaine. BNP a le devoir de se désolidariser radicalement des géants pétro-gaziers.

 

Pour l’heure, la banque choisit pourtant de nous condamner : tout déni ou toute omission équivalent à un soutien clair à la destruction des conditions d’habitabilité de notre monde.

 

Face à la violence des dérèglements climatiques qui frappent déjà nos quotidiens, nous ne pouvons imaginer un avenir professionnel autrement que mis au service d’une transformation rapide et juste de nos sociétés. Nos compétences et nos vocations sont prêtes à nourrir les prochaines stratégies climatiques, à condition que celles-ci soient à la hauteur de l’urgence.

 

Notre décision est prise, c’est désormais aux dirigeant·es de BNP Paribas de choisir : incarner le sursaut dont nous avons besoin ou nous maintenir sur l’autoroute de l’enfer climatique. La banque d’un monde qui change, en bien ou en mal.

 

Cette tribune a été signée par plus de 1 240 étudiants. La liste complète des signataires peut être trouvée ici.

 

Premiers signataires :

 

Victoria Constantini (Mines de Paris), Anastasia Léauté (université Paris Cité), Hermès Couturier (CentraleSupélec), Louis Fidel (HEC), Anaïs Vansteene (Paris Nanterre), Salma Chaoui (université Paris Dauphine PSL), Noémie Elgrably (ESSEC), Marion Vittet (ESCP Busines School), Lucie Sarthre (Ecole des Ponts et Chaussées), Philémon Matray (Ecole polytechnique), Mathis Fidaire (Dauphine PSL), Clara Bolac (AgroParisTech), Auriane Meiller (AgroParisTech), Tiphaine Langlois (Sciences-Po Paris)

 

Par Un collectif d'étudiants

 

Voir aussi : « Lycéens, nous sommes en grève contre l’A69 »

 

 

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