Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
3 décembre 2013 2 03 /12 /décembre /2013 15:31

Notre époque charge le dioxyde de carbone, le CO2, d’une lourde malédiction. C’est l’ennemi numéro un de notre environnement, le coupable, clairement désigné, de "crime climatique".

 

Qui peut encore le nier ? Mais qui peut refuser de voir que la dangereuse augmentation du CO2 dans l’atmosphère est le résultat de l’emballement d’un monde industriel développé qui gaspille les ressources fossiles accumulées sur la planète au cours de millions d’années et les disperse sous forme d’objets inutiles et de polluants multiples.

 

Qui, dans ce contexte, se souvient encore que le CO2 est d’abord l’aliment des plantes nécessaires à notre alimentation et que celles-ci, de plus, libèrent, en échange de leur consommation de CO2, l’oxygène que nous respirons à plein poumons ?

 

L’histoire de la découverte du dioxyde de carbone et de son rôle dans le fonctionnement du vivant est une aventure à rebondissements qui mérite d’être contée.

 

Après Van Helmont et Hales : Joseph Black.


Joseph Black (1728-1799) et l’air fixe.

 

Joseph Black est né à Bordeaux, où ses parents étaient négociants en vins. Il s’inscrivit à l’Université de Glasgow à l’âge de dix-huit ans, et quatre ans plus tard partit terminer ses études de médecine à Édimbourg.

 

Il y est l’élève de William Cullen, médecin et professeur écossais. Celui-ci dispose d’un laboratoire bien équipé, en particulier pour les mesures des masses et des volumes gazeux.

 

A la demande de son professeur, il s’attache à étudier l’action et les propriétés chimiques de la "magnésie blanche" (carbonate de magnésium), utilisée comme laxatif. Cette étude l’amène à étudier, de façon quantitative, la calcination de la craie et sa transformation en chaux vive.

 

voir : (J.Black,“Expériences sur la magnésie blanche, la chaux vive, et sur d’autres substances alkalines" p.210).

 

Il constate que cette opération s’accompagne d’une perte de poids de la chaux obtenue.

 

Dans le même temps un gaz se dégage auquel il donne le nom, déjà utilisé par Hales, d’air fixe car "fixé" dans la craie.

 

JPEG - 47.8 ko

" Je lui ai donné le nom d’air fixe, dit-il, et peut-être très improprement, mais j’ai pensé préférable d’utiliser un nom familier en philosophie, que d’inventer un nouveau nom avant que nous soyons mieux informés de la nature et des propriétés de cette substance, ce qui sera probablement le sujet de mes prochaines recherches."

 

voir : Experiments upon magnesia alba, quick-lime, and other alcaline substances, p70

 

Son choix de conserver ce nom d’air fixe, "familier en philosophie", sera approuvé par ses contemporains qui, jusqu’à Lavoisier, continueront à qualifier "d’air fixe" le gaz que nous désignons aujourd’hui comme dioxyde de carbone (CO2 ).

 

Cette réaction de calcination peut se traduire par les équations :

 

Craie → Chaux vive + Air fixe

 

carbonate de calcium → Oxyde de Calcium + dioxyde de Carbone

 

CaCO3 → CaO + CO2

 

Ainsi la craie (pour nous du carbonate de calcium CaCO3) résulterait de la combinaison de la chaux vive (oxyde de calcium CaO) et de l’air fixe (CO2). Sa calcination aurait pour effet de libérer cet "air fixe" en le séparant de la chaux.

 

Notons que le sens initial du mot calciner est : transformer en chaux.


JPEG - 71.8 ko

Four à chaux (encyclopédie)


Une autre expérience vient confirmer cette vue.

 

Black et ses compatriotes savent que la chaux vive est très avide d’eau avec laquelle elle réagit avec un fort dégagement de chaleur pour donner de la "chaux éteinte", notre hydroxyde de calcium Ca(OH)2, si utile pour différents usages dont la construction de murs résistants. Cette chaux éteinte peut se dissoudre partiellement dans l'eau pour donner une solution incolore : l'eau de chaux. Si cette eau de chaux est laissée à l'air libre, une pellicule se forme à sa surface. Black constate qu'il s'agit de calcaire dont il imagine qu'il s'est reformé à partir de la chaux et de l'air fixe présent dans l'atmosphère.

 

Précipitation du calcaire :

 

Chaux dissoute + air fixe → Calcaire

 

Quel est l'écolier qui n'a pas hérité de cette expérience de Joseph Black : en soufflant au moyen d'une pipette dans un verre d'eau de chaux incolore, on observe qu'elle se trouble et qu'un précipité blanc de calcaire insoluble se dépose au fond du récipient sous l'action du gaz carbonique contenu dans l'air expiré. Ce nouveau calcaire pourrait, à son tour, être calciné et redonner de la chaux et de l'air fixe.


 


Cet air fixe (notre CO2), facilement caractérisable par sa réaction avec l’eau de chaux, Black l’observe aussi dans l’action d’un acide sur la craie et également dans un grand nombre d’autres opérations. Par exemple, comme Van Helmont, dans la combustion du charbon ou dans les fermentations.

 

Ainsi se précisent les contours de cet être nouveau, l’air fixe, aux propriétés très différentes de celles du classique air atmosphérique. Notons qu’il est caractérisé, au premier abord, par le fait qu’il n’autorise ni les combustions ni la vie animale. Encore désigné sous le nom d’air méphitique, il commence mal sa nouvelle vie dans l’univers des corps chimiques.

 

C’est, cependant, un nouveau "principe" dont il convient d’étudier l’ensemble des propriétés chimiques. Dans cette tâche Black sera relayé par plusieurs de ses compatriotes.

 

Parmi ceux-ci, Henry Cavendish (1731-1810).


pour aller plus loin voir :

 

Un livre chez Vuibert.

 

JPEG - 77.7 ko

Dérèglement climatique, fonte des glaces, cyclones, sécheresses…coupable : le dioxyde de carbone.

 

Pourtant sans ce gaz il n’y aurait aucune trace de vie sur Terre.

 

L’auteur nous fait suivre la longue quête qui, depuis les philosophes de la Grèce antique jusqu’aux chimistes et biologistes du XVIIIe siècle, nous a appris l’importance du carbone
et celle du CO2.

 

L’ouvrage décrit ensuite la naissance d’une chimie des essences végétales qui était déjà bien élaborée avant qu’elle ne s’applique au charbon et au pétrole.

 

Vient le temps de la « révolution industrielle ». La chimie en partage les succès mais aussi les excès.

 

Entre pénurie et pollutions, le « carbone fossile » se retrouve aujourd’hui au centre de nos préoccupations. De nombreux scientifiques tentent maintenant d’alerter l’opinion publique.
 

Seront-ils entendus ?

 


Voir aussi :

 

Une brève histoire du CO2. De Van Helmont à Lavoisier.

Partager cet article
Repost0

commentaires

Présentation

  • : Le blog d'histoire des sciences
  • : Comme l'art ou la littérature,les sciences sont un élément à part entière de la culture humaine. Leur histoire nous éclaire sur le monde contemporain à un moment où les techniques qui en sont issues semblent échapper à la maîtrise humaine. La connaissance de son histoire est aussi la meilleure des façons d'inviter une nouvelle génération à s'engager dans l'aventure de la recherche scientifique.
  • Contact

Recherche

Pages

Liens