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1 août 2021 7 01 /08 /août /2021 12:43

Parmi les multiples qualificatifs qu'on puisse attribuer à Jules Verne on ne relève pas assez souvent celui, pourtant essentiel, de vulgarisateur scientifique. Dans des romans comme "vingt mille lieues sous les mers" ou dans "Robur le Conquérant", il serait fastidieux de relever la longue liste des pages dans lesquelles il décrit les découvertes techniques de son temps en n'oubliant pas de citer leurs auteurs. Ses contemporains, lecteurs des revues scientifiques à grand succès, la Nature, l'Année Scientifique..., ou encore des "Merveilles de la Science" de Louis Figuier, ne pouvaient manquer d'y retrouver un clin d’œil à leur actualité sous la forme d'un habillage narratif. Celui-ci permettant par ailleurs une ouverture à un public plus habitué à la lecture de "Causeries littéraires" qu'à celle des "Causeries Scientifiques". Ce public n'était certainement pas à l'époque celui de la jeunesse dans lequel on a voulu le cantonner par la suite.

 

Jules Verne ne fait pas d'anticipation dans le sens que nous donnons à ce mot aujourd'hui, il nous décrit la naissance des techniques de son temps, dont nous sommes les héritiers, et imagine leur développement. Relire Jules Verne c'est y trouver les descriptions des objets techniques utilisés, par exemple, dans le Nautilus du capitaine Nemo ou "l'Albatros" de l'ingénieur Robur. Loin d'alourdir le récit elles lui ajoute une saveur "belle époque" et nous invitent à  un voyage dans le passé sans la froideur d'un discours historique académique.

 

A l'amateur, ou même au chercheur, attiré par l'histoire des sciences et des techniques, Jules Verne propose des pistes de recherche. Un exemple dans ce texte extrait de "Robur le Conquérant".

 

L'Albatros de Robur

" Ce n’est ni à la vapeur d’eau ou autres liquides, ni à l’air comprimé ou autres gaz élastiques, ni aux mélanges explosifs susceptibles de produire une action mécanique, que Robur a demandé la puissance nécessaire à soutenir et à mouvoir son appareil. C’est à l’électricité, cet agent qui sera, un jour, l’âme du monde industriel. D’ailleurs, nulle machine électromotrice pour le produire. Rien que des piles et des accumulateurs. Seulement, quels sont les éléments qui entrent dans la composition de ces piles, quels acides les mettent en activité ? C’est le secret de Robur. De même pour les accumulateurs. De quelle nature sont leurs lames positives et négatives ? On ne sait. L’ingénieur s’était bien gardé – et pour cause – de prendre un brevet d’invention. En somme, résultat non contestable : des piles d’un rendement extraordinaire, des acides dune résistance presque absolue à l’évaporation ou à la congélation, des accumulateurs qui laissent très loin les Faure-Sellon-Volckmar, enfin des courants dont les ampères se chiffrent en nombres inconnus jusqu’alors. De là, une puissance en chevaux électriques pour ainsi dire infinie…

 

Mais, il faut le répéter, cela appartient en propre à l’ingénieur Robur. Là-dessus il a gardé un secret absolu"

 

Jules Verne n'est ni le premier, ni le seul, à prédire que l'électricité "sera, un jour, l’âme du monde industriel" et il est vrai que notre 21ème siècle cherche à trouver le secret de Robur, celui des piles et accumulateurs électriques qui pourraient peut-être un jour faire voler les "plus lourd que l'air". Le curieux pourra s'arrêter sur la mention des accumulateurs "Faure-Sellon-Volckmar". C'est toute l'histoire des premiers accumulateurs depuis ceux de Gaston Planté qu'il pourra parcourir. Par exemple dans "La Physique Moderne" de Édouard Hospitalier ou encore dans la revue La Nature dans l'article : Nouveaux perfectionnements apportés aux accumulateurs électriques. . Il constatera que nos actuels accumulateurs au plomb en sont les héritiers directs et qu'il serait peut-être utile d'y réfléchir avant de les mettre au rebus.

 

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24 juillet 2021 6 24 /07 /juillet /2021 14:19

Cicatrice de la science : parfois un mot, un nom, une expression, une règle,  semblent échapper à toute la logique que l'on attendrait des sciences. De quoi irriter l'apprenti scientifique. Un retour sur l'histoire de la discipline est alors nécessaire et nous rappelle que la science est une activité humaine, une activité vivante, qui porte parfois les cicatrices de son passé.

 

La notion de courant électrique a une longue histoire qui semble s'achever en cette fin de 19ème siècle où s'éclaire la notion d'atome. Cette particule apparaît alors comme constituée d'un noyau portant des charges électriques positives, les protons, et des charges négatives dans un nuage d'électrons gravitant autour de celui-ci. Deux conceptions opposées du courant électrique se rejoignent alors. Celle de Franklin considérant un fluide unique circulant du pôle positif du générateur qui porte un excès d'électricité vers son pôle négatif qui en présente un  défaut. Celle d'Ampère qui imagine deux courants de fluide négatif et de fluide positif émis par chaque pôle et se croisant dans le conducteur. Ampère choisissant alors de définir comme sens conventionnel du courant celui du fluide positif.

 

Nous voici arrivés au moment où la situation se fige.

 

Il est vrai que, dans l’électrolyse, deux courants de charges opposées se croisent dans la solution d’électrolyte, suivant ainsi le modèle proposé par Ampère. Dans les conducteurs métalliques, par contre, seules les charges négatives sont mobiles. Le fluide positif reste immobilisé dans les noyaux fixes des atomes. Le courant électrique doit à présent être considéré, dans un circuit métallique, comme un unique courant d’électrons se déplaçant du pôle négatif du générateur vers son pôle positif. C'est à dire dans le sens inverse de celui proposé par Franklin et choisi de façon conventionnelle par Ampère.

 

Cette découverte est-elle un évènement suffisant pour provoquer une révolution dans les conventions électriques ? Il faut constater qu’on s’accommodera de ces électrons qui se déplacent dans le sens inverse du sens "conventionnel". Ce déplacement n’est d’ailleurs pas spectaculaire. Nous pouvons à présent répondre à l’ancienne interrogation de Maxwell. La vitesse du courant d’électrons dans un courant continu n’est pas de plusieurs millions de lieues à la seconde et si elle est quand même supérieure à un centième de pouce à l’heure, elle ne dépasse pas quelques centimètres à l’heure. Ce résultat parle peu à l’imagination. Ce lent courant d’électrons s’accorde mal avec la puissance observée des phénomènes électriques. C’est peut-être pourquoi on préfère continuer à raisonner sur le courant mythique des premiers temps de l’électricité qui se précipiterait du pôle positif vers le pôle négatif.

 

Un courant d'électrons, vraiment ?

 

Pour qui constate l'allumage instantané de la lampe après qu'on ait pressé l'interrupteur, il est quand même difficile de se satisfaire de ce lent déplacement des électrons. Encore plus difficile quand ce courant est alternatif et que les électrons vibrent sur place. Une question se pose : et si ce déplacement d'électrons n'était pas un simple effet du "courant électrique" qui, lui, serait bien autre chose.

 

Et d'ailleurs ces électrons ! De Broglie en a donné la représentation d'une onde que la technique a su mettre en œuvre dans les microscopes électroniques. La physique quantique les a transformés en "quantons" ni ondes ni particules mais nouvelles entités que le cerveau même des chercheurs a du mal à mettre en image.

 

Combien de temps faudra-t-il pour qu'un nouveau modèle du courant électrique prenne place dans les manuels scolaires et pour que le modèle actuel s'ajoute à la liste des Cicatrices de la Science.

 

Pour l'instant faut-il nous contenter de considérer qu'un courant électrique est ce phénomène physique que nous mesurons avec un ampèremètre ?

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14 juin 2021 1 14 /06 /juin /2021 14:47

Le robot arroseur fonctionne à distance, via le Bluetooth du téléphone portable. Le prototype du jeune Landivisien Yann Kerhervé, élève au lycée du Léon à Landivisiau (Finistère) passionné de jardinage, a été primé par la revue Science et Vie junior.

Ouest-France

 

Lorsqu’on a 15 ans, comment concilier son amour du jardinage avec une passion de la programmation informatique et de la domotique, tout en accordant le temps nécessaire aux travaux scolaires ? Yann Kerhervé, en classe de seconde au lycée du Léon à Landivisiau (Finistère), a trouvé la solution en inventant un « Arros’Heure ». Il en déclenche le fonctionnement grâce au Bluetooth du portable posé sur son bureau. Et peut-être bientôt pendant les vacances, à partir de tout point du globe, grâce à Internet et au Wifi.

 

Ce petit appareil d’arrosage automatique lui a notamment valu de décrocher le premier prix du concours mensuel de la revueScience et Vie junior ! Avec à la clé, une dotation de 1 000 €, dont il va dépenser une partie pour se payer une imprimante 3D destinée à améliorer les boîtiers de son invention. Il a, bien entendu, déposé un certificat à l’Institut de la propriété industrielle.

 

Il pourrait être de nouveau à l’honneur à la fin de l’année, lors de la sélection des trois meilleurs inventeurs de l’année 2020. Avec une remise des prix au Palais de la découverte à Paris.

Le jardinage, Yann le pratique depuis son plus jeune âge, grâce à son grand-père maternel. Il est d’ailleurs le seul de la famille à cultiver cette passion pour les légumes du potager familial !

 

Durant l’été dernier, le collégien, qui venait de passer trois années à suivre les séances hebdomadaires du club de robotique monté par Erwan Tréguer, enseignant au collège Kerzourat à Landivisiau (club qui a décroché le premier prix régional au concours national 2020 « Course en cours »), a pensé qu’il pouvait éviter les opérations d’arrosage grâce au savoir acquis lors de son cursus collégien, en matière de programmation informatique et de domotique.

 

Une application pour gérer l’arrosage

Quelques lectures, une carte programmable Arduino, équipée d’un microcontrôleur permettant de commander des actionneurs, des capteurs à ultrasons permettant de mesurer la hauteur d’eau de pluie dans un bac récepteur, un moteur asynchrone pour actionner un robinet quart de tour… Et le tour était joué !

 

Restait (seulement !) au jeune inventeur à mettre en relation toutes les informations recueillies (hauteur d’eau et température extérieure) pour faire fonctionner le servomoteur selon un temps prédéfini, fermer ou rouvrir le robinet sur 24 heures…

Grâce au Bluetooth, une application – créée par le Landivisien, tout aussi spécialiste de l’informatique que de l’électronique et la domotique – permet de savoir s’il faut arroser ou non, laisser faire automatiquement ou manuellement pendant une durée de 30 minutes à 3 heures.

Un dossier de 20 pages

Le dossier de 20 pages réalisé par le collégien aura séduit le jury de Science et Vie junior.

 

Yann estime que son prototype ne lui aura pas coûté plus de 40 €. D’autant plus que les cadeaux d’anniversaire ou de fin d’année ont été faciles à trouver : des composants électroniques tout simplement !

Le jeune homme, qui suit cette année 1 h 30 de sciences numériques et techniques au lycée du Léon, ne devrait pas s’arrêter en si bon chemin. Son rêve de devenir officier de la marine marchande pourrait d’ailleurs s’accompagner, s’il se réalise, de quelques inventions qui ne resteraient pas seulement des prototypes…

 

Voir aussi :

 

À 16 ans, le jeune inventeur finistérien à nouveau primé grâce à son arroseur automatique.

En mai 2020, Yann Kerhervé avait été honoré par la revue Science et Vie Junior. Un an plus tard, le Landivisien décroche le titre de second meilleur jeune inventeur de l’année en France.

https://brest.maville.com/actu/actudet_--a-16-ans-le-jeune-inventeur-finisterien-a-nouveau-prime-grace-a-son-arroseur-automatique-_-4680609_actu.Htm

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9 mars 2021 2 09 /03 /mars /2021 19:11
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27 janvier 2021 3 27 /01 /janvier /2021 12:35

3 septembre.

 

Le combat d'Ouessant ne s'est pas arrêté pour moi avec le retour de l'escadre à Brest. Je suis chaque jour occupé à soigner tous ceux qui ont survécu à leurs blessures et sont recueillis à l'hôpital de fortune installé dans l'ancien séminaire des jésuites. Pour mon premier baptême du feu, l'horreur a été au rendez-vous au delà de l'imaginable. Le chirurgien major Etienne Billard avait cherché à me préparer en me décrivant les blessures que j'aurais à affronter, ce sang qui inonderait l'infirmerie, ces mourants et leur plaintes auxquelles il nous faudra être sourds. J'étais pourtant loin d'imaginer la réalité qui m'attendait.

 

Dès la première décharge les premiers blessés nous sont arrivés. L'obligation d'agir  vite, de ne pas hésiter à trancher tel bras, telle jambe, de recoudre à vif telle plaie ouverte m'avait alors rapidement anesthésié. Seul le geste comptait. C'est en remontant à l'air libre, quand le navire a été à l'ancre dans la rade de Brest, que j'ai découvert le pont ravagé, les morts récents qui n'avaient pas été immergés dans la mer d'Iroise et qu'on avait regroupés au pied des mâts et les blessés remontés de l'infirmerie dont le regard me suivait attendant de moi le miracle que je savais ne pas pouvoir leur promettre.

 

C'est la lettre reçue de Paris de Mathieu le Goff, mon camarade du collège de Navarre, qui m'amène à confier au papier les quelques réflexions qu'elle m'inspire. Il me fait savoir que la nouvelle du combat avait été rapportée à Paris par le Duc de Chartes qui s'y était présenté en vainqueur. Son triomphe n'a été qu'éphémère quand des officiers arrivés à Paris ont donné du combat un tout autre récit. Le retard du Duc à une manoeuvre décisive avait en réalité privé l'escadre française d'une victoire incontestable et permis à l'Anglais de s'échapper. Ce que Mathieu ne savait pas c'est, qu'à Brest, le Duc était maudit par les officiers comme par les hommes d'équipage. Non seulement la faute impardonnable du Duc était connue mais pour l'en disculper quatre capitaines étaient convoqués devant le conseil de guerre pour en répondre.

 

Il me revenait de mon côté un étrange évènement. L'officier que j'avais reconnu comme étant l'homme que j'avais vu habillé en civil à Poullaouen pendant la visite de la mine de plomb argentifère, avait eu pendant le combat un étonnant comportement. Plusieurs fois il était descendu dans l'infirmerie porteur de blessés. Sa place n'était-elle pas à la manoeuvre sur le pont ? Plus tard, alors que je faisais le tour des derniers blessés en passe d'être descendus à terre, je l'ai vu venir vers moi. Ma curiosité étant trop forte, je l'ai abordé en breton et lui ai demandé s'il se souvenait de notre rencontre. L'étonnement, qu'il n'a pas pu cacher, d'être ainsi découvert, m'a bien amusé. Il a dû m'avouer, toujours en breton, qu'il n'était aucunement officier de marine mais commissaire de police au service du roi. Sa mission était de s'assurer de la protection du Duc mais le ton employé ne me semblait pas particulièrement enthousiaste. Je ne serais pas étonné d'apprendre qu'il aura été parmi ces officiers venus apporter au roi et au ministre de la marine, de Sartine, un rapport plus véridique.

 

D'étranges confidences aussi de la part d'un officier à présent décédé. Il me disait avoir reçu l'information d'un ami membre de la loge maçonnique active à Brest. Peut-être était-il lui même ce maçon. Le Duc de Chartes affirmait-il, en tant que grand-maître des maçons de France, avait présidé une réunion de la loge brestoise peu de temps avant la bataille. La loge était à Brest essentiellement constituée d'officiers de marine et avait à l'occasion pendant les périodes de paix, accueilli des officiers anglais, maçons de passage. Aux dires de cet officier mourant il aurait été convenu qu'à aucun moment la vie du grand-maître ne pouvait être menacée. De la même façon la volonté d'en découdre avait été très faible du côté anglais dont les officiers était eux mêmes en voie de passer devant leur conseil de guerre croyait-on savoir.  Ce combat, dès le début, n'avait été qu'un simulacre. Un simulacre qui aura fait des centaines de morts et de blessés graves des deux côtés. Indigné, cet officier qui se savait mourant, voulait que quelqu'un le sache, même si dans le même temps il me demandait de garder le secret sur l'auteur de l'information.

 

Que l'information soit vraie ou ne le soit pas, je m'interroge. Pourrais-je longtemps être le jouet des grands de ce monde et consacrer ma vie à tenter de sauver les hommes qu'ils auront décidé de sacrifier pour leur simple gloire ?

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26 janvier 2021 2 26 /01 /janvier /2021 17:26

28 juin 1778.

 

La guerre est là. A peine revenu de l'hôpital du Folgoat où j'ai soigné les blessés de la Belle-Poule, un ordre vient de m'être porté m'enjoignant de rejoindre le bord du Saint-Esprit.

 

Je connais ce bâtiment sur lequel j'ai déjà embarqué pour des manoeuvres dans la rade de Brest. C'est un 80 canons qui a la réputation d'être solide et bon marcheur. Il compte déjà une vingtaine d'années de service mais demeure l'un des meilleurs de la flotte. J'y serai l'adjoint du chirurgien-major Billard.

 

Le Saint-Esprit au combat.

 

Familier des routes de l'Afrique et des Antilles, le Saint-Esprit a été construit pour opérer pendant des semaines, loin de ses bases sans toucher terre. Pour nourrir les 900 membres de l'équipage et des troupes de marine embarquées, il peut emporter pour trois mois de consommation d’eau, six mois de vin, cinq à six mois de vivres, soit plusieurs dizaines de tonnes de biscuits, farine, légumes secs et frais, viande et poisson salé, fromage, huile, vinaigre, sel, sans compter le bétail sur pied qui est abattu au fur et à mesure de la campagne. 

 

Toute cette capacité ne peut que rassurer un officier de santé, à condition d'être bien gérée. Mon oncle Mazéas m'a fait cadeau de "l'essai sur les moyens les plus propres à conserver la santé des gens de mer" qu'il a traduit de l'anglais James Lind, membre du collège royal des médecins d'Edimbourg.  Comment ne pas partager l'ambition de l'auteur qui note que "conserver la santé des gens de mer, c'est entretenir la force, l'activité, le courage, qualités si nécessaires au service du Roi. En effet, il n'y a point d'entreprises difficiles ou dangereuses aux yeux d'un équipage qui jouit d'une parfaite santé ; les plus grands obstacles s'évanouissent alors."  J'ai, hélas, pu constater que notre marine a bien des progrès à faire si elle veut rivaliser, sur le sujet de l'hygiène, avec la flotte britannique. 

 

Le Saint-Esprit est commandé par La Motte-Piquet dont la légende alimente, depuis longtemps déjà, les chroniques brestoises mais aussi celles des rives de la Tamise où sa réputation de redoutable adversaire n'est plus à faire. Il n'est pas un officier ou un matelot qui ne souhaite servir sous ses ordres.

 

J'ai fait mes adieux au Chevalier de Boufflers. Il espérait voir des détachements de son régiment embarqués sur l'un des vaisseaux de l'escadre où serait affecté le duc de Chartres mais il n'en est rien. Il croit savoir que le roi lui même s'y est opposé, celui-ci ayant déjà retardé sa promotion au grade de colonel sous le prétexte, lui a-t-on rapporté, qu'il "n'aime ni les épigrammes ni les vers". "Je suis fou d'aimer la gloire, elle ne veut pas de moi" m'a-t-il confié en me quittant. Il en était d'autant plus affecté qu'il croyait savoir, malgré le secret entourant sa venue, que le Duc serait embarqué sur le Saint-Esprit et que j'aurais ainsi, à nouveau, l'occasion de le croiser après notre escapade aux mines de Poullaouen.

 

 7 juillet.

 

Je suis à bord du saint-Esprit depuis le 29 juin. J'ai pris possession de mon infirmerie. Assez vaste, bien abritée au centre du vaisseau. Le coffre aux remèdes est abondamment pourvu. La présence du Duc à bord y est certainement pour beaucoup. J'ai visité les réserves. A l'évidence nous ne sommes pas partis pour une longue croisière. Le Chevalier avait vu juste, il n'était pas question de débarquer sur le sol anglais.

 

Je n'ai pas manqué d'ouvrage depuis mon arrivée. Comme trop souvent une partie de l'équipage est constituée de malheureux récemment raflés sur les quais et d'autres sortis des prisons. Certains souffrent de fièvres, d'autres présentent des plaies qu'il faut soigner au plus vite. Ils tremblent de froid dans des vêtements souvent en loques et déjà imprégnés de l'eau de mer. Plusieurs se sont déjà blessés dans des manoeuvres qu'ils découvrent à peine. L'infirmerie est leur refuge.

 

Des marins aguerris passent parfois sous le prétexte d'une blessure légère et plus surement pour voir qui les soignera si le besoin s'en fait sentir. Ma réputation m'a suivie depuis l'affaire de la Belle Poule et ils semblent rassurés. Ils nous donnent des nouvelles du pont. La présence du Duc ne les rassure pas. Ils connaissent leurs officiers et leur font confiance, mais que vient faire à leur bord ce commandant sans expérience de la guerre et encore moins de la mer. Qu'avaient à faire sur ce navire les cuisiniers, valets d'office, rôtisseurs et sommeliers qu'il avait embarqués avec lui*.

 

Etant monté sur le pont pour prendre l'air il m'est arrivé d'y croiser le Duc de Chartres entouré de sa Cour. J'ai eu la surprise d'observer, à une distance respectueuse du Duc, le personnage rencontré à Poullaouen lors de la visite de la mine de plomb argentifère. Le bref regard qu'il ma lancé a semblé indiquer que je luis rappelais moi-même quelque chose. Il était alors vêtu d'un costume civil. Je le retrouve ici sous l'uniforme d'un officier bleu. Il est manifestement attentif à ce qui se dit autour de lui. Je me souviens qu'il semblait parfaitement comprendre le parler breton que pratiquent beaucoup de nos marins. Rien de ce qu'ils croient échanger dans le secret de leur langue ne lui échappe. Cette campagne s'entoure de mystère.

 

Nous appareillons dès demain.

 

 

 

 

notes

https://www.histoire-genealogie.com/Les-chirurgiens-navigants-sur-les-navires-du-roi

* Merci à Jean-François Parot historien méticuleux et magnifique narrateur et à son commissaire Le Floch (Le noyer du grand canal)

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24 janvier 2021 7 24 /01 /janvier /2021 15:52
Gérard Borvon

In the year 1746, everything seems to have been said on the subject of electricity and the interest of the "Philosophers of Nature" goes towards other curiosities. It was then that M. de Réaumur, a member of the Académie des Sciences, received a letter from his Dutch correspondent, Pierre Van Musschenbroek, which again boiled scientific Europe.
 

 


 

In a few decades, a new science was born:

Electricity.




It began with his baptism by Gilbert, his popularization by Otto de Guericke and Hauksbee, his entry into the academic world with Gray and Dufay.


A man, in this new period, rises to the rank of the first of the "electrifying". He is a skillful experimenter: the abbot Nollet.

 

L'abbé Nollet

 

While his predecessors were still rubbing simple glass tubes or sticks of sulfur or resin, he built impressive machines with flywheel and gear drive. In numerous and abundantly illustrated books, he makes known his experiences, he describes his devices. The number of editions reflects the interest generated. In Paris, in the provinces, abroad, new arrangements are implemented by following its directives or by renewing already older experiments.
 
 
In this year 1746, however, everything seems to have been said on the subject and the interest of the "Philosophers of Nature" goes towards other curiosities. It was then that M. de Réaumur, a member of the Académie des Sciences, received a letter from his Dutch correspondent, Pierre Van Musschenbroek, which again boiled scientific Europe.
 
 
 
 
 
 

 

 

 

 

 

 

Terrible news from Leiden

Pierre Van Musschenbroek (1692-1761) is professor of physics at Leiden and author of widely translated works. One day in 1746, one of his collaborators, M. Cunéus, was busy "electrifying" the water contained in a bottle. He holds it with one hand, a conductor connected to an electric machine is immersed in it. The method, as we will see, is unusual.

 

 


 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Musschenbroek

It is when he deems the bottle sufficiently charged that he has a painful surprise. He brings his free hand closer to the conductor immersed in the bottle. At the same moment his hand is struck by a noisy spark, his body writhes in a spasm of extraordinary violence. An unbearable pain overcomes him. Pierre Van Musschenbroek and his colleague Allamand, informed of the miracle, verify the phenomenon. It is Musschenbroeck who informs learned circles of all the capitals of Europe.

 


L’expérience de la Bouteille de Leyde (Les Merveilles de la science)


 

His letter will be read on April 20 in Paris during a session of the Academy of Sciences and commented on by Abbé Nollet:


"I want to communicate to you a new but terrible experiment which I advise you not to attempt yourself... I had suspended from two silken threads an iron cannon, AB, which received by communication the electricity of the glass globe, which was rapidly rotating on its axis, while it was rubbed by applying the hands to it; at the other end B hung freely a brass wire, the end of which was plunged into a round glass vase D, partly filled of water which I held in my right hand F, and with the other hand E, I tried to shoot sparks from the electrified cannon: suddenly my right hand F was struck with such violence that I had the body shaken as from a thunderbolt; the vessel, though of fine glass, does not usually break, and the hand is not injured by this shock, but the arm and the whole body are affected by a terrible way that I cannot express: in a word, I believed that it was the end of me”.

 

Another letter from Leyden confirms this testimony. It is from M. Allamand.


“You must have heard of a new experience that we have done here (the description of the experience follows)... You will feel a prodigious blow which will strike your whole arm, and even your whole body, it is a thunderbolt; the first time I tried it, I was so dazed that I lost my breath for a few moments: two days later, M. Musschenbroek having tried it with a hollow glass ball, he was so deeply affected that a few hours later, having come to my house, he was still moved by it, and told me that nothing in the world would be able to make him try the thing again."

 

The abbe Nollet, who knows the seriousness of his interlocutors, approaches this new experience with a certain apprehension. The result confirms his apprehension.


"I felt in my chest and in my bowels, a shock that made me involuntarily bend my body and open my mouth".


Terrible ! Such is the phenomenon. Gradually, however, it is domesticated and the primitive terror fades. Electricity then descends into the streets, or rather into the gardens and parks, where, as Abbé Nollet notes, it “shows itself to the people”.

 

We were not without noticing that two people holding hands simultaneously receive the electric shock when, one carrying the bottle, the second touches the conductor connected to the machine. Two people, then three... the chain gets longer.

 

Nollet is not the last to engage in these “media” demonstrations. He imagines unloading a bottle of Leyden through the chain formed by three hundred soldiers of the French guards holding hands. The people should not have been indifferent to the spectacle of these “guardians of order” shaken by the electric shock. Better: monks forming a conductive chain around their abbey will prove, by jumping in the air all together under the effect of the electric discharge, that it propagates at an extraordinary speed. At least this is how rumor translated a wiser experiment carried out by Lemonnier in the Carthusian convent.

 

 

Everyone strives to offer a different scenario: a doctor uses the Tuileries basin to transmit electricity. A certain prince, at the end of an opera performance, applauds a demonstration of electric shock presented on stage by the actors.


We also exchange recipes. Abbot Nollet offers several:


"Try the Leiden experiment with a porcelain coffee cup, with a rock crystal bottle, if you can get one, or with one of those little brown pots in which butter from Brittany is sent to Paris and to that of Normandy; and that will succeed for you.

 

 

 

The Leyden bottle is therefore the first “electric capacitor”. It may seem surprising that such a spectacular observation was only made so late.


The fault perhaps lies with Dufay. Having been one of the first to electrify the liquid contained in a bottle, he had inaugurated a strict method, often referred to as "Dufay's rule". The electrical fluid must not be able to escape from the bottle. For this, the vase containing the liquid had to be made of thick glass and, above all, placed on a perfectly insulating support! An academic electrician would never have deviated from the rule. It therefore took a poorly informed experimenter to break with this tradition. This poor manipulator was however going to provoke, without having sought it, a revolution.

 

 

How does this bottle work?


Musschenbroek, the first, admits his ignorance: he no longer understands anything, he says, and can no longer explain anything about electrical phenomena. A bottle held in the hand should never have been able to be charged, especially if it was made of thin glass. The electrical fluid had to pass through the thin thickness of glass to flow without difficulty towards the earth through the body of the operator. Yet it was this ridiculous assembly, this manipulation outside of all the rules, which had caused the most violent phenomena ever observed.

 

 

Better ! The more the glass is thin, the more violent the shaking. The more contact with the ground is ensured, for example by covering the external part of the bottle with a sheet of metal, the greater the efficiency will be. Everything seems to work opposite to what is expected. Those who attempt an explanation quickly give up: the Leyden bottle remains an exception. We'll use it but we'll forgo finding out more for now. Once again, it will take an observer without academic training to overcome the obstacle. It will be Franklin once again.

 

Franklin

 

It should be remembered that Franklin imagines a unique electrical fluid which permeates all bodies and which can simply be accumulated or rarefied by means of devices acting as "pumps". It is again this model which allows him to interpret the functioning of the Leyden bottle in a truly convincing manner. The wire connected to the machine and dipping into the liquid in the bottle pushes back, he says, an excess of electrical fluid into it. At the same time, the same quantity of this fluid is repelled through the glass and expelled, from the external metal frame then from the hand of the observer who carries it, towards the earth.

 

In reality, as Franklin said, the bottle is not really "charged" with electricity because, "whatever quantity of electric fire passes through the top, an equal quantity comes out through the bottom." The phenomenon stops when it is no longer possible to get more electricity into the bottle, that is to say when "it can no longer be extracted from the lower part". When this moment arrives, a strong positive charge has accumulated in the bottle while an equivalent lack has been created in the external armature.

 

From then on, the “electric shock” is clearly explained. By connecting the internal and external parts of the bottle by a conductive body, balance is suddenly restored. If this conductor is a small diameter metal wire, it can become incandescent or even melt. If it is a person, they will experience a shock that they will not soon forget. If it is a small animal, it could lose its life.

 

Franklin's interpretation aroused the enthusiasm of many supporters among those who had been left thirsty by the mystery of the Leyden bottle. This will also irritate many. Nollet, for example, cannot give up losing its place as “first” European electrician. A controversy arose between him and Franklin over the question in which part of the bottle the electricity accumulated.

 

Nollet believes that it is the water in the bottle which concentrates the electricity and he proves it: a bottle full of water being charged with electricity, pour this water into another bottle placed next to it on a pedestal table. You will find that this second bottle is quite capable of giving you an electric shock. The electricity was therefore transmitted with the water in the bottle.

 

Franklin asserts on the contrary that it is in the glass that this accumulation is located and he also proves it: a bottle full of water being charged with electricity, pour this water into another bottle placed next to it on a table, as Father Nollet recommends. You will notice that this second bottle is completely incapable of giving the slightest electric shock. On the other hand, the first bottle, although empty, retained all its potency. This can easily be seen by refilling it with uncharged water. The electric charge was therefore well preserved in the glass.

 

Two opposing observations for two absolutely identical experiments? One clarification, however: the pedestal table on which Abbé Nollet places his second bottle is made of a conductive metal, contrary to the rule published by Dufay. Franklin's is covered with a very dry plate of glass, which does not correspond to the standards of the Leiden experiment!

 

We leave it to the informed reader to decide between these two doctors. We will simply observe that Franklin, emphasizing that water plays no role in this matter, does not need a container to contain it. He will therefore use, instead of bottles, glass tiles placed between two lead blades of slightly smaller size. A layout close to that of our current capacitors. Nollet, for his part, popularized the traditional bottle, easy to bild and simple to use. However, he will replace the water with lead shot, iron filings or better, crumpled gold leaf. In this form, the Leyden bottles, often combined in batteries, will spread to the most unexpected places. For example in the doctor's office.

Une bouteille miracle.

collection Jean-Jacques Kress

 

Very early on, the therapeutic effect of this miracle bottle was envisaged. One had barely had time to ascertain some of the properties of electricity when a whole world of healers lacking respectability or doctors waiting for clients had already seized it. Already yellow amber, then called succin, was a traditional element of the pharmacopoeia, it was therefore logical that we seek to use its essential "principle", the electric fluid, this vital fluid which already allowed Thales to “give life to inanimate beings”.

 

 

To Give life or take it: Bose killed flies by striking them with the spark flying from his outstretched finger. Nollet kills sparrows by using a Leyden bottle. Franklin kills a turkey by discharging an entire "battery" of loaded bottles through the poor animal.


Take life or give it back: a previously drowned sparrow is brought back to life by the discharge of a bottle. A hen is resurrected by the same means. The Leyden bottle really works miracles.

 

 

It is easy to imagine the benefits that could be gained by skillful manipulators from these machines capable of extracting "fires" and other "effluvia" from this or that diseased organ of their patient. Collecting the entire medical “bloopers” of the 18th century would require several volumes. Father Berthollon, a famous and often translated popularizer, sees electricity as a real panacea: it makes you lose weight, it even makes your hair grow back! It is possible to give vigor to indolent natures by administering positive electricity to them and naturally to calm the nervous with negative electricity. Electricity promotes flow: electrifying the patient during bleeding gives a jet of blood that is “lively, dilated and extending far away”. Mr. Jallabert, professor of "Experimental Philosophy" is categorical, no one can question the results obtained on his patients "and if some doctors have seen contrary examples, I suspect that fear or someone other particular obstacle , will influence the experience".

 

A fear certainly justified and which could only grow from the moment the Leyden bottle came to strengthen the healer's arsenal. Father Nollet was the first to try to apply electric shocks to a paralytic. Judicious approach when we notice the involuntary contractions thus caused. The beginnings seem encouraging: under the effect of the shock the patient sees muscles that have been inert for a long time contract. But autonomous motor skills do not return and we must give up. However, some cases of cure are announced, many paralytics voluntarily expose themselves to electric shock. One increase the capacity of the Leyden bottles, one combine them into batteries and, soon, one are very close to killing our patient because they are no longer pleasant sparks coming out of these devices.

 

 

Mr. Jallabert, for example, wants to reinforce the effect of the shock by using hot water. One day he uses boiling water:


"I substituted boiling water for hot water. Very bright flashes appeared of their own accord before you put your hand near the vase: they become even brighter and more numerous when you put your hand on them. at the moment when the person, who touched it with one hand, with the other drew a spark from the bar, the fire with which the vase was filled suddenly appeared with inexpressible vivacity. At the same moment an orbicular piece of the vase of 2 lines and half diameter was thrown against the wall which was five feet away...
The astonishing vivacity of a fire which cannot be better compared to that of lightning; this incredible phenomenon of a vase pierced by the action of electricity, the terrible shock felt by the one who pulled the spark: all this had impressed on the spectators a terror which did not allow me to expose any from them to a second torture.

 

 

 

...a fire that one cannot better compare to that of lightning...


Already, in his first letter the image had been used by Musschenbroek: "my whole body shook as if by a thunderbolt...". Is it just an image or is there really an identity between lightning and electric discharge? The idea has been in the air for several years. Father Nollet had already suggested it. It is surprising to note that the years go by without any European scientist really seeking to explore this analogy further. It will take an American "amateur", Franklin again, to shake up old Europe and revive interest in electrical science.

 


 

 
 
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26 décembre 2020 6 26 /12 /décembre /2020 12:49

 

Lorsque l’on visite le magnifique musée de l’électricité qui a été aménagé dans la propriété qu’André-Marie Ampère possédait à Poleymieux -aux pieds des Monts d’Or et à quelques lieues de Lyon - on remarque, dans la salle consacrée à l’illustre savant et à sa famille, une plaque sur laquelle figure la mention suivante :
« Le jeune André-Marie AMPERE n’est jamais allé à l’école : guidé par son père, il s’est instruit lui-même à Poleymieux ».

Pour en juger, le mieux est de parcourir l'autobiographie de Ampère publiée sur le site Ampère/CNRS.
 

André-Marie Ampère naquit à Lyon le 20 janvier 1775 de Jean-Jacques Ampère, négociant, et de 
Jeanne-Antoinette de Sutières-Sarcey. Son père qui n'avait jamais cessé de cultiver la 
littérature latine et française, ainsi que plusieurs branches des sciences, l'éleva lui-même 
dans une campagne voisine de la ville où il était né. Jamais il n'exigea de lui d'étudier quoi 
que ce soit, mais il sut lui inspirer un grand désir de savoir. Avant de pouvoir lire, le plus 
grand plaisir du jeune Ampère était d'entendre des morceaux de l'Histoire naturelle de Buffon, il 
demandait sans cesse qu'on lui lût l'Histoire des animaux et des oiseaux dont il avait appris 
depuis longtemps tous les noms en s'amusant à en regarder les figures. La liberté qu'on lui 
laissait de n'étudier que quand il lui plaisait de le faire fut cause que, quoiqu'il sût épeler 
depuis longtemps, il ne lisait point encore, et c'est en s'exerçant seul à comprendre l'Histoire 
des oiseaux qu'il apprit enfin à lire couramment. Bientôt la lecture des livres d'histoire et des pièces de théâtre qu'il trouvait dans la bibliothèque de son père l'attacha autant que 
celle de Buffon. Il se passionnait pour les Athéniens et les Carthaginois et prenait en haine les 
Lacédémoniens et les Romains, quand il les voyait subjuguer ou détruire les peuples qu'il 
affectionnait. Il prenait un singulier plaisir à apprendre des scènes entières des tragédies de 
Racine et de Voltaire et à les réciter en se promenant seul. Les sentiments que ces lectures 
développaient en lui s'exaltaient par ce qu'il entendait raconter des évènements de la guerre que 
l'Angleterre et la France se faisaient alors au sujet de l'indépendance des États-Unis. 

Son père qui connaissait et parlait même la langue de Virgile aussi bien que l'aurait pu faire le 
plus habile professeur lui inspira le désir de l'apprendre en lui récitant souvent des vers de cet admirable poète, dont 
l'harmonie charmait le jeune Ampère. Il sut bientôt assez de latin pour comprendre les auteurs qui 
ne présentent pas de grandes difficultés ; mais à treize ans, les Éléments de mathématiques de 
Rivard et de Mazéas étant tombés sous sa main, toute autre étude fut oubliée (2). Il s'en 
occupa uniquement, et la lecture de ces deux livres fut suivie de celle de l'algèbre de Clairaut et 
des traités des sections coniques de La Chapelle et du Marquis de L'Hôpital (3). Ne connaissant 
personne qui eut la moindre connaissance des mathématiques, il se mit à composer un traité des 
sections coniques avec les matériaux qu'il trouvait dans ces ouvrages et des démonstrations qu'il 
imaginait et croyait nouvelles. Mais quand il voulut lire les articles de mathématiques de 
l'Encyclopédie, il fut arrêté par l'emploi du calcul infinitésimal dont il n'avait aucune idée.
 

Ayant à cette époque, pendant un séjour de quelques mois que son père fit à Lyon, eu 
l'occasion de voir M. Daburon, alors professeur de théologie au Collège de la Trinité de Lyon, 
aujourd'hui inspecteur général des études, qui s'était beaucoup occupé de mathématiques, il 
lui raconta l'embarras où le mettaient les d qu'il trouvait dans ces articles sans qu'on y eut dit 
ce que cette lettre représentait. M. Daburon fut frappé de ce que le jeune Ampère avait fait sans 
autre secours que les livres qu'il avait étudiés. Il eut la bonté de lui donner quelques leçons 
de calcul différentiel et de calcul intégral et lui aplanit ainsi les difficultés qui l'avaient 
arrêté. Son père, pénétré de reconnaissance, se lia d'une intime amitié avec M. Daburon qui 
venait parfois passer quelques jours à la campagne où il avait ramené son fils. M. Daburon 
dirigea les études mathématiques du jeune Ampère et lui inspira une nouvelle émulation qui 
rendit ses progrès plus rapides. 

Chaque année, M. Ampère passait deux mois à Lyon ; il conduisit son fils à quelques leçons du 
cours de physique de Monsieur le Professeur Mollet (4). De retour à la campagne, celui-ci lut quelques 
ouvrages de physique, et quelque temps après, la lecture des Lettres de Rousseau sur la botanique 
lui ayant inspiré une grande ardeur pour l'étude de cette science, il partagea son temps entre les 
herborisations et les calculs. 

Cependant, les troubles politiques amenaient en France des évènements aussi désastreux 
qu'inattendus ; la guerre civile éclata, et Lyon fut assiégé par l'armée de la Convention. M. 
Ampère laissa sa famille à la campagne et se fit un devoir de ne pas abandonner ses concitoyens. 
Il refusa de sortir de la ville assiégée et lorsqu'elle succomba, il fut une de premières 
victimes du tribunal révolutionnaire.

Voir la suite  sur le site Ampère CNRS.

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21 décembre 2020 1 21 /12 /décembre /2020 10:15

Gérard Borvon

Je me souviens de Keranden et des moments que j'y partageais avec mes élèves du lycée de l'Elorn situé à moins d'une encablure. Le manoir abritait alors au rez de chaussée une salle d'exposition très accueillante et à l'étage un service des archives avec de confortables espaces de travail.

 

L'histoire de ces moments de transit pédagogique entre le lycée et le manoir avait commencé quand Françoise Dincuff, alors adjointe au maire chargée de la vie culturelle, m'avait signalé la présence des ouvrages de l'ancienne bibliothèque municipale dans le grenier poussiéreux de la mairie. Connaissant mon intérêt pour l'histoire des sciences, elle croyait y avoir repéré des collections qui pourraient m'intéresser.

 

Elle ne se trompait pas. On y trouvait en particulier un nombre important de revues de vulgarisation scientifique dont "La Nature". Cette revue, très didactique et superbement illustrée, couvrait la période 1878-1914. Elle méritait d'être mise au contact des lycéennes et lycéens pour une approche plus vivante de la science.


 

C'est alors que Marie Pierre Cariou acceptait de recevoir l'ensemble de la collection au service des archives et d'accompagner les élèves dans leurs travaux. Complétant leurs recherches personnelles, le travail de l'année se résumait dans un dossier collectif sous le titre " Les Sciences, il y a 100 ans". Ainsi, année après année, ces lycéennes et lycéens ont découvert les premiers pas de leur actuelle "modernité". Le début de l'éclairage électrique, la découverte des rayons X et de la radioactivité, le cinéma, la radiophonie, les premières voitures... La petite heure de cours qui pouvait y être consacrée chaque semaine ne suffisait pas. Les plus intéressés n'hésitaient pas à retourner au centre des archives pendant leurs heures de loisir. Chacune et chacun savait y être chaleureusement accueilli. Il est rare dans une vie d'enseignant de vivre une expérience d'une telle richesse.

 

Comment ne pas s'en souvenir.

 

voir aussi : http://histoires-de-sciences.over-blog.fr/2016/03/du-phenakistiscope-au-cinematographe.html


 

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12 décembre 2020 6 12 /12 /décembre /2020 13:35

Le 23 novembre 2020, a eu lieu une journée d’hommage national à André-Marie Ampère, placée sous le haut patronage de Madame Frédérique Vidal, Ministre de l’Enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation et avec le soutien de ce Ministère.

voir : https://oxi99.com/FXJIDEC30/4F1DA2FAE9F44C9BB91EB03865B6533B.php

 

Ressources documentaire :

 

https://ampere2020.fr/ressources-documentaires-et-pedagogiques/le-monde-de-lelectricite/

  • BELTRAN, Alain. La fée électricité, Paris : Découvertes Gallimard, 1991.
  • BLONDEL, Christine. Histoire de l’électricité, Paris : Pocket, 1994.
  • BORVON, Gérard. Histoire de l’électricité, de l’ambre à l’électron, Paris :Vuibert, 2009. Consultable sur overblog
  • FARA, Patricia. An Entertainment for Angels. Electricity in the Enlightenment, Cambridge: Icon Books, 2002.
  • MORUS, Iwan Rhys. Michael Faraday and the Electrical Century, Cambridge: Icon Books, 2004.
  • Thomas Edison, Les Cahiers de Science & Vie, avril 1996n°32.
  • Benjamin Franklin : comment réussit-il à vaincre la foudre ?, Les Cahiers de Science & Vie, août 1995, n° 28.
  • Revue générale de l’électricité, numéro spécial intitulé : « Ampère, André Marie. » n°6 novembre 1922. Consultable sur Gallica:
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